Jérôme ROUER et TEP Navuth, d'après "La vie du Paysan khmer ", Commission des Moeurs et Coutumes du Cambodge (entre autres).
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Présentation générale | Règles de base |
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La discrétion, le respect d'autrui et la dignité sont les principes essentiels de la politesse, comme le montrent certains des préceptes de la plus élémentaire bienséance khmère : se baisser en passant devant quelqu'un, ne pas parler fort, ne pas faire de bruit en mangeant, ne pas parler la bouche pleine, présenter un plat, un verre, en le tenant par la base, attendre que le voisin ait fini de se servir pour prendre une part dans les plats disposés au centre des convives, ne pas choisir uniquement ce que vous plaît dans les mets proposés, ne pas refuser ce que l'on vous offre et, si l'on trouve quelqu'un en train de manger, se retirer discrètement, avec une excuse habile si, par courtoisie, on vous propose de partager le repas....
D'autres règles sont inspirées par les mêmes
soucis, mais conditionnées par le mode de vie local : on
ne comprendrait pas, par exemple, la très grande importance
donnée à ce que le khmer, la femme en particulier,
apprenne à marcher
légèrement chez soi ou chez quelqu'un, si l'on ne savait pas que,
dans la maison ordinaire, les lattes des planchers surélevés
vibrent aisément sous un pas trop fort, et que les gens,
vivant assis ou couchés sur des nattes, sont directement
atteints par ces vibrations. Dans ce cas, les jeunes filles khmères sont très critiquées et
traitées de Sreï khat léak (salope !), si elles ont le pas lourd dans la maison ou si elles marchent
à grand pas rapide qui provoque le bruit de leur sampot
Des usages qui sont le prolongement des murs anciennes restent toujours,
comme les génuflexions devant les princes.
Le sompéah, accompagné des mots
"tchumrieap sour" (bonjour), façon
de saluer en plaçant les paumes à plat l'une contre
l'autre et les levant ainsi à une hauteur différente
suivant le rang de la personne. Cette élévation
va de la poitrine au front pour les Khmers et jusqu'au
dessus de la tête pour les Thaïs.
Au temps où l'on n'allait guère autrement que pieds
nus, les Khmèrs ne se souciaient pas de savoir si l'on
enlevait des chaussures pour entrer dans le temple.
La règle du déchaussage a commencé à
se répandre à la suite du voyage d'un religieux
Cinghalais, qui a fait savoir en même temps qu'il trouvait
irrévérencieux de fumer devant l'autel du Bouddha.
Cela ne veut point dire que les Cambodgiens manquaient de respect,
mais qu'ils l'exprimaient autrement. Autrefois, un homme se dénudait
le buste, en signe d'humilité peut-être, pour entrer
à la pagode; aujourd'hui au contraire, il revêt une
veste. Quant aux femmes, elles ont gardé de l'époque
où c'était le seul voile de leur buste l'habitude
de mettre par révérence une écharpe sur leur
corsage, et seraient fort gênées de n'en point avoir
pour aller à la pagode. Par contre, les femmes comme les
hommes ayant coutume de se découvrir la tête devant
un supérieur, ce qui le plus souvent consiste à
enlever le kramà qui protège du soleil, ni
les unes ni les autres ne songeaient à pénétrer
le crâne couvert dans les pagodes.
Mettant leur fierté à être discrets, les Cambodgiens
n'en considèrent pas moins l'hospitalité
comme le premier des devoirs.
Certes, grâce aux sàlà de voyageurs
que tous villages de quelque importance construisent comme uvre
pie, les étrangers qui passent restent en marge des villages.
Mais si l'étranger se trouve contraint à demander
abri, si la moindre connaissance est de passage, alors tout est
mis en uvre pour bien recevoir l'hôte.
2- Les communistes (Khmers rouges puis régime de Heng Samrin, 1975-1991)
ont changé profondément les
rapports entre les personnes. La politesse traditionnelle comportait
tout un code de langage minutieux qui marquait les liens du sang
et la hiérarchie sociale. Du jour au lendemain ce protocole
fut remplacé par le seul mot mit ou samamit (camarade)
suivi par la dernière syllabe de leur prénom ou
par les mots "ainé", "cadet" ou "enfant"..
(lire l'étude sur les noms de famille)
Depuis, une grande partie de la politesse traditionnelle a disparu.
Salutations | les titres |
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Actuellement le Cambodgien s'identifie par un nom de famille,
en général mono-syllabique (à 90 %), et un prénom qui peut être multi-syllabique.
Si on veut faire peuple on portera un nom et un prénom monosyllabes.
La politesse sociale, dans les situations de représentation, exige l'emploi du
titre (lok ou lok sreï, ou tout autres) suivi du Nom + Prénom.
Kniom est la forme unique pour "je", "moi",
"mon", "ma", "mes" ) se traduit
par :
Les relations, même amicales, plus agées ne peuvent pas être adressées avec le "a".
On utilise "bang" (grand frère), "pou" (oncle) "om"
(grand oncle) "lok ta" (l'ancien)
Les enfants s'adressent aux parents avec les expressions "pâ" (papa)
ou mâ (maman)
s'ils sont citadins, "pok" et "mé" s'ils sont villageois.
On s'adresse aux bonzes par l'expression "dekoune". dekoune peut
être utilisé par des domestiques s'adressant à leur maïtre.
Expressions de salutations populaires comparées ( Thaïs,
Khmers, Viêts , Chinois ) entendues à la pagode,
au cours d'une réunion d'anciens, par Navuth TEP en décembre
1996.
Les expressions populaires de salutation révèlent
une mentalité ou des soucis ancrés dans la mémoire
collective.
Il convient de rappeler au préalable un dicton khmer qui
fut souvent cité :
Chez les Thaïs, la phrase de salutation est " ça
va di kha?" qui signifie "Comment allez vous,
ça va bien ?"
Les Khmers s'aborderont en disant : " Mien kon chau
ponman heuï ?" phrase directe qui se traduit
par " Combien avez vous d'enfants et de petits enfants?".
Les Vietnamiens ont des salutations populaires nettement vulgaires.
Leur expression favorite est "Dou mè
",
littéralement " Chatte de ta mère". D'après
de vieux bonzes, l'origine de cette incorrection serait à
rapprocher du fait que les vietnamiens regrettent de ne pas avoir
tué tous les Khmers et insultent leur vis à vis
comme s'il avait manqué de détermination dans cette
tâche macabre.
Le Chinois, lui, est très simple. IL n'est intéressé
que par l'argent... Lorsque deux Chinois se rencontrent, ils s'interpellent
par " Ou sengli bor?" qui signifie "
Combien avez vous gagné aujourd'hui?"
Salutations normales
(lire l'étude sur le nom)
Pour les actes officiels et la carte de visite, le nom de famille vient
toujours en premier, suivi du prénom.
Dans la vie sociale de tous les jours, si on n'utilise pas
un des titres, monsieur (lok) ou madame (lok sreï),
ban (pour les aînés), pohône (pour les cadets),
on ne doit utiliser que le prénom, sauf à être méprisant.
- "serviteur" dans une conversation avec
un étranger; (Kniom)
- "serviteur-plante-des pieds" pour honorer
quelqu'un d'important; (Kniom Bât)
- "serviteur-compassion" lorsque l'on s'adresse
à un bonze, (Kniom Prâkarena)
- "serviteur portant sur sa tête la divine adoration
sous la poussière la plus fine des augustes pieds de Monseigneur
Maître" pour s'adresser au roi;
Mais on dira :
- "aîné" (Bhaon) si l'on est
son cadet, sa fiancée ou sa femme;
- "enfant", " petit enfant",
"neveu", si l'on parle à ses parents,
grand-parents, oncles, gens plus anciens;
- "Agne" quand on s'adresse à des enfants,
quand on est en colère, que l'on insulte autrui qui sera
alors appelé "Aaèng".
A ce sujet , il convient de faire attention dans l'usage du tutoiement
le Khmer ressentira la relation "je -tu" comme celle
du " Agn-Aèng", où la personne
tutoyée est placée à un rang inférieur.
C'est une expression de mépris. Même des amis se
tutoient rarement en public.
Les titres
lok est l'équivalent du "monsieur" français,
lok sreï est l'équivalent de "madame",
neang kagna est l'équivalent de "mademoiselle",
samdech, titre royal, est l'équivalent de "monseigneur",
ek oudom, titre ministèriel, est l'équivalent de "excellence",
(le féminin est tchoum tieu),
neak angmachâ est l'adresse utilisée pour les membres de la
famille royale ("altesse")
Les bonzes s'adressent aux
laïcs en employant "gnôme"
Les expressions populaires de salutations
Seam min chol kboune ( Les siamois agissent par intérêt),
Youn min chol put (Les Viêts agissent par tromperies), Khmers
borisoth min chol sachak ( Les Khmers vertueux sont toujours honnêtes),
A chen apalak min chol lola ( Les chinois bêtes agissent bruyamment).
Expression très européenne, montrant seulement
l'intérêt social que l'on porte à l'autre.
Une telle adresse s'explique, disent les vieux, par les traumatismes
de l'Histoire. Au cours des siècles, chaque famille a connu
la mort violente, que ce soit à cause des envahisseurs
thaï ou viet, ou à cause des folies politiques de
leurs dirigeants. Les Khmers ont été et se sont
exterminés. Les survivants s'interrogent sur leur descendance
et la survie de leur race. Le reste compte moins.