Source :Les Institutions politiques et organisation administrative
du Cambodge ancien par Sachchidanand SAHAI, EFEO, 1970
Texte : Jérôme ROUER
Il ressort de cette bien faible documentation que le modèle
angkorien est très proche, surtout sur le plan théorique,
du modèle indien tant pour les institutions religieuses
que politiques ou administratives. Les brahmanes, familles installées
de longue date au Cambodge ou nouveaux visiteurs venant d'Inde,
avaient la plus grande influence auprès de la royauté
dont ils étaient les précepteurs, les tuteurs et
les conseillers, tout comme au royaume de Champa.
Les brahmanes étaient , à double titre, indispensables
à la monarchie khmère : ils légitimaient
le pouvoir du roi et organisaient le royaume.
Par la cérémonie sacrée du sacre royal, ils
conféraient au roi le titre de monarque universel (cakcravartin),
et , par la même occasion, lui donnait ce caractère
divin qui était le fondement de son pouvoir. Le fait que
les rois-usurpateurs se soient toujours appuyés sur les
brahmanes démontre qu'ils devaient avoir acquis un réel
monopole de l'Etat et un contrôle total de la royauté.
PRINCIPES POLITIQUES
Les Khmers avaient adopté sans aucune modification la théorie des sept éléments constitutifs de l'Etat, base de tout le système politique hindou. (Cette théorie dit que l'Etat est constitué de sept éléments : le chef de l'Etat, les officiers, la population et le territoire, la ville fortifiée, le trésor, l'armée, l'allié) Ils étaient très familiarisés avec les traités politiques de l'Inde ancienne, les six procédés de la diplomatie, les quatre expédients et les trois puissances.
Dès avant l'époque angkorienne le roi était considéré comme Indra en personne. Pareil à ce dieu, il assure la prospérité du royaume.
L'époque d'Angkor se distingue par l'institution du culte du Devaraja, qui existait en Inde et à Java, et par l'établissement d'une administration centralisée : les royaumes conquis ont été transformés en provinces dirigées par des fonctionnaires. Les provinces possédaient leur gouverneur, leur propre cour de justice et leurs propres fonctionnaires.
Le roi était protecteur du Dharma, de l'ordre établi, de la Loi et de la Justice. Il n'avait pas de pouvoir législatif, mais un fort pouvoir pénal (il était assimilé au Yama, dieu qui inflige les châtiments dans l'au-delà) et militaire.
ADMINISTRATION
Les fonctionnaires étaient divisés en quatre catégories horizontales, comme s'il y avait quatre administrations parallèles, avec au sein de chacune une classification hiérarchique extrêmement complexe, marquée par des titres, des insignes et un protocole complexe.
Le régime pénal était d'une sévérité extrême pour les coupables de basse extraction. L'appareil judiciaire, très influencé par l'Inde, dont le roi était le plus haut magistrat, garantissait avant tout la propriété privée.
Le procès comprenait tout comme en Inde, quatre parties : la plainte, la réponse, l'examen de l'affaire par la cour, la décision. Les notions de preuve ou de défense ne semblaient pas exister.
Le système fiscal, très lourd, était basé sur un cadastre minutieux et un grand nombre de percepteurs.
Les chefs militaires et les hauts fonctionnaires bénéficiaient d'importantes concessions terriennes. Ce fait fut peut être la cause principale de l'affaiblissement du pouvoir central.
L'instruction était faite dans les temples royaux et les ermitages.